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Méfiez Vous des Slogans du Type « Jouez le Joueur, pas les Cartes »

avril 29, 2020
par PokerStarsSchool

Les joueurs débutants ont suffisamment à faire avec les nombreuses notions à assimiler au poker pour qu’on les pollue avec des clichés complètement dépassés. Pourtant, les connaissances tout droit venues des années 90, quand le poker était un jeu intuitif et fait essentiellement de tells, existent toujours. Elles ne sont toutefois pas compatibles avec le poker moderne. Allez, on va casse du mythe, vous voulez bien ?

« Jouez le Joueur, Pas les Cartes »

La première partie de ce slogan n’est pas forcément mauvaise, mais elle peut porter à confusion. La deuxième partie est absurde et nous allons voir pourquoi. Tout d’abord, d’où vient ce slogan périmé et pourquoi existe-t-il toujours aujourd’hui ?

 

Les racines de cette sagesse apparente ont poussé à la fin des années 90, début des années 2000 quand le poker a commencé à se développer et sortir de sa réputation de jeu obscur. A cette époque, les tournois télévisés mettaient en avant la lecture des joueurs, cet art de faire de gros calls, folds ou bluffs en se basant sur des reads en live. Le conseil « jouez le joueur, pas les cartes » était une façon de marquer l’importance de réagir aux tendances et tells de ses adversaires. Ce conseil comblait également un manque évident de compréhension technique. A ce moment-là, les sites d’entraînement, les livres, le GTO et les solvers n’existaient pas. Ce slogan existe toujours aujourd’hui car il est plus simple à comprendre et plus sexy que la version plus complète ci-dessous :

« Apprenez comment les cartes doivent être jouées de manière théorique, puis procédez à des ajustements en fonction des tendances de vos adversaires. » Ca sonne un peu moins flashy, mais les fondations de votre jeu n’en seront que plus solides.

Les Risques de Jouer le Joueur

Ce vieux slogan peut tenter les joueurs débutants, qui manquent logiquement de connaissances pour bien jouer les cartes, à se résoudre à essayer de lire leurs adversaires (de manière approximative la plupart du temps) au lieu d’apprendre les fondamentaux. Un débutant dira souvent des choses comme « je croyais qu’il bluffait » quand on lui demande de justifier un play qu’il vient de faire. Peut-être qu’il va expliquer une mise ou une relance par un « je représentais la couleur » et penser que ce raisonnement est acceptable. Quand on lui demande plus précisément quel était son read sur le fait que son adversaire était en bluff, la réponse est souvent un haussement d’épaules. On est dans le cas typique de mauvaise question -> réponse aléatoire.

Cette pensée old school – jouez le joueur – a appris à ce joueur débutant qu’il doit toujours savoir ce que ses adversaires font. C’est comme si je vous demandais de deviner la couleur du pull que je porte en vous promettant 100 € si vous avez raison. Vous tenterez bien une réponse au hasard, mais c’est tout ce que vous pouvez faire face à cette question impossible. Parce que le joueur débutant pense qu’il a besoin d’avoir une réponse à la question « que fait mon adversaire ? », il en invente une. Il tente une réponse, parfois il aura raison (mon pull est bleu pour info, bravo à ceux qui ont trouvé), mais ce ne sera pas souvent le cas. Le résultat est que ses décisions sont prises au hasard parce qu’il essaye de jouer un joueur qu’il ne connaît pas. Il néglige la façon dont ses cartes devraient être jouées de manière théorique et contre un field plus large que ce joueur. Une manière de jouer qu’il connaît finalement plutôt bien s’il arrête ses bêtises et qu’il se concentre dessus.

Lire à la perfection un joueur en live pour repérer un énorme déséquilibre dans son sizing est une magnifique expérience. Mais cela n’arrive pas assez souvent pour avoir une quelconque importance sur le long terme. Au lieu de vous demander ce qu’un adversaire que vous ne connaissez pas essaye de faire ou à quoi il pense quand il mise, posez vous la question de savoir ce qu’un joueur typique de vos limites est susceptible de faire. Si vous ne savez pas, alors demandez-vous quelle range il devrait avoir ici et comment vous devriez vous adapter.

Pourquoi vous DEVEZ jouer les cartes

Ce que vous avez en main a de l’importance. Même si vous avez un read sur votre adversaire, cela ne peut que vous emmener dans une direction exploitante (jouer le joueur). Vous devez en effet réfléchir à comment votre main peut maximiser son EV contre sa range. Par exemple, si vous avez 5 5 hors de position sur un board K K 5 7 2 et un joueur accrocheur a payé vos mises au flop et à la turn, alors vous aurez envie d’overbet à la river. Votre adversaire a un paquet de Kx dans sa range car vous ne bloquez aucune de ces combinaisons. En revanche, si vous avez K K, vous devrez sans doute envisager une mise plus petite ou même un check pour induire des bluffs de la part de tirages ratés. Il y a une grosse différence entre ces deux mains et vous devez combiner vos connaissances théoriques et la lecture que vous avez de votre opposant. Jouez le joueur si possible, mais jouez avant tout les cartes !

 

Miser Sans Raison

L’un des plus gros défauts qu’un joueur débutant doit éradiquer de son jeu à tout prix est le fait de placer des mises et des relances qui n’accomplissent rien car il a oublié quelles sont ses cartes et comment cela affecte son EV. Si, à la river, vous avez une main marginale qui va gagner contre des tirages ratés mais perdre contre de plus grosses paires, miser relève souvent du suicide. L’apprenti joueur peut toutefois tomber dans le piège du read obsessionnel qu’il pense avoir sur son adversaire et miser. Quand on lui demande alors pourquoi il a fait ça, il répondra souvent « parce que je le mets sur un tirage raté ». Si ce read est correct et basé sur une évidence (qui n’en est pas une en général) et si notre joueur débutant n’a rien du tout, alors OK, cette mise peut faire coucher à l’autre un joueur un meilleur tirage que le sien. Quand il détient une paire, en revanche, et en l’absence de read concret, tout ce qu’il obtient c’est faire coucher à son opposant une moins bonne main, l’empêchant ainsi de bluffer. Cela peut aussi coûter cher contre des paires plus fortes qui auraient pu check back la river.

Miser sans raison est souvent une conséquence de « jouez le joueur, pas les cartes ».

La nostalgie c’est bien, mais le poker a beaucoup évolué ces 20 dernières années. Adoptez une approche moderne de ce jeu passionnant et tout ira bien !

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